L'ulcère de l'estomac, aussi appelé ulcère gastrique, et l'ulcère duodénal, qui se forme dans le duodénum (première partie de l'intestin grêle), sont en quelque sorte des plaies ouvertes dans la muqueuse du tube digestif, plus ou moins profondes (voir schéma ci-dessous).
Ces plaies sont douloureuses, car elles entrent directement en contact avec l’acide présent dans le tube digestif. Une situation comparable à l’application d’un tampon d’alcool sur une éraflure.
L’expression « ulcère gastroduodénal » englobe, en raison de la similitude de leurs manifestations, l’ulcère gastrique et l’ulcère duodénal.
On estime qu’environ 10 % de la population des pays industrialisés est susceptible de souffrir un jour ou l’autre d’un ulcère. Les personnes âgées de 40 ans et plus sont les plus touchées. Les ulcères du duodénum sont 10 fois plus fréquents que les ulcères de l’estomac.
Les Causes de l'ulcère duodénal
La bactériee chlorhydrique (HCL), un acide fort qui permet aux enzymes digestifs d’être actifs et détruit la plupart des microbes (parasites, virus, bactéries, champignons) qui se seraient introduits dans l’estomac.
Le contenu de l’estomac est toujours acide. Son pH varie de 1,5 à 5, selon la nourriture ingérée et aussi selon les individus.
D’autres glandes sécrètent un mucus destiné à protéger les parois internes de l’estomac :
- ce mucus empêche les enzymes digestifs et l’acide chlorhydrique de détruire la paroi de l’estomac en formant un film protecteur.
La paroi de l’intestin grêle est également recouverte d’une couche de mucus qui la protège de l’acidité du chyme, nom donné à la « bouillie alimentaire » qui provient de l’estomac.
Évolution
Habituellement, un ulcère apparaît progressivement en quelques semaines. Il peut aussi se manifester rapidement, après quelques jours de prise d’anti-inflammatoires non stéroïdiens, par exemple, mais cette situation n’est pas très fréquente.
Le taux de cicatrisation spontanée pourrait avoisiner les 40 % (sur une période de 1 mois), particulièrement si l’ulcère était causé par la prise d’AINS et qu’on a cessé de les prendre. La guérison définitive spontanée, sans rechute, est toutefois rare.
Si l’ulcère n’est pas traité ou que la cause n’est pas enrayée, il y a de fortes possibilités que les ulcères réapparaissent dans l’année qui suit.
Complications possibles
Les complications sont rares. L’ulcère peut causer une lente hémorragie : le sang s’écoule alors à l’intérieur du tube digestif. On remarque que les selles deviennent noires. Les saignements peuvent causer une anémie avec le temps, s’ils ne sont pas détectés. Il faut consulter un médecin sans tarder.
Une autre complication, beaucoup moins fréquente que l’hémorragie, est la perforation complète de la paroi du tube digestif. Cette situation engendre de violentes douleurs abdominales, qui s’aggravent rapidement en péritonite. Il s’agit d’une urgence médicale.
Les symptômes de l'ulcère de l'estomac et l'ulcère duodénal (ulcère gastroduodénal)
Symptômes généraux
- Une sensation récurrente de brûlure dans la partie supérieure de l’abdomen.En cas d’ulcère de l’estomac, la douleur est aggravée par le fait de manger ou de boire.En cas d’ulcère duodénal, la douleur s’apaise au moment des repas, mais s’accentue de 1 h à 3 h après avoir mangé et lorsque l’estomac est vide (durant la nuit, par exemple).
- La sensation d’être vite rassasié.
- Des éructations et des ballonnements.
- Signes d’aggravation
- Des nausées et des vomissements.
- Du sang dans les vomissements (de couleur café) ou les selles (de couleur noire).
- De la fatigue.
- Une perte de poids.
Note : Chez les femmes enceintes qui souffrent d’ulcères, les symptômes ont tendance à disparaître durant la grossesse, car l’estomac est moins acide. Toutefois, des sensations de brûlure peuvent survenir vers la fin de la grossesse en raison de la pression qu’exerce le foetus sur l’estomac. À ce sujet, voir notre fiche Reflux gastro-oesophagien.
Les personnes à risque et les facteurs de risque de l'ulcère de l'estomac et l'ulcère duodénal (ulcère gastroduodénal)
Personnes à risque
- Les femmes âgées de 55 ans et plus, pour les ulcères d’estomac.
- Les hommes âgés de 40 ans et plus, pour les ulcères duodénaux.
- Certaines personnes pourraient avoir une prédisposition héréditaire aux ulcères gastroduodénaux.
Facteurs de risque
Certains facteurs peuvent aggraver ou retarder la guérison des ulcères en rendant l’estomac plus acide :
- le tabagisme
- la consommation excessive d’alcool
- le stress
- chez certaines personnes, l’alimentation aggrave les symptômes :Boissons : le café (même décaféiné), le thé, le lait, les boissons à base de cola; aliments : les aliments gras, dont le chocolat et les concentrés de viande; épices : le poivre noir, les graines de moutarde et la muscade.
Le piment fort : à bannir ?
On a longtemps recommandé aux personnes atteintes d’un ulcère d’estomac ou du duodénum de ne pas consommer de piments forts à cause de leur effet piquant et « brûlant », qui pourrait exacerber leur douleur.
Or, les études semblent démontrer que les piments forts n’entraînent pas de dommages supplémentaires au tube digestif. Ils pourraient même avoir un effet protecteur. En outre, utiliser le poivre de Cayenne en épice, même en grande quantité, n’aggraverait pas les ulcères. Cependant, la prudence est de mise à l’égard des capsules de capsaïcine (la substance qui confère au piment son goût piquant) et autres concentrés, qui peuvent contenir des quantités beaucoup plus élevées de capsaïcine que l’aliment.
La prévention de l'ulcère de l'estomac et de l'ulcère duodénal (ulcère gastroduodénal)
Mesures pour prévenir les ulcères
Il est important d’utiliser adéquatement les médicaments anti-inflammatoires non stéroïdiens ou AINS (aspirine, Advil®, Motrin®, etc.). Sinon, ils risquent de causer des brûlures d’estomac, ou même un ulcère gastroduodénal. La sensibilité à ces médicaments varie d’une personne à l’autre, entre autres selon l’âge, la dose et la durée d’utilisation.
Voici quelques renseignements utiles. Pour en savoir plus, demandez conseil à votre médecin ou à un pharmacien.
- Parfois, pour soulager une douleur (mal de tête, douleur musculaire, douleur articulaire, etc.), mieux vaut consommer de l’acétaminophène (Tylénol®) ou un autre médicament que votre médecin vous suggérera.
- Si vous devez prendre des anti-inflammatoires, respectez la posologie et la durée recommandées du traitement. On ne devrait pas consommer les AINS durant plusieurs semaines sans une ordonnance médicale claire.
- Il peut être avisé d’utiliser les anti-inflammatoires conjointement avec un médicament antiacide, qui prévient les brûlures d’estomac, ou avec un cytoprotecteur, comme le misoprostol (Cytotec®). Ce dernier est toutefois contre-indiqué durant la grossesse.
- Les anti-inflammatoires se divisent en 2 grandes catégories : les classiques (Advil®, Motrin®, Naproxen®...) et les coxibs (Celebrex®, Mobicox®). Ces derniers ont une action plus spécifique et comportent moins de risque d’effets indésirables sur l’estomac.
- Attention à la prise d’Alka-Seltzer (contenant de l’aspirine) et de Pepto-Bismol (contenant du sous-salicylate de bismuth) pour soulager les symptômes de l’ulcère et qui peuvent parfois les aggraver, chez certains individus.
- Les biphosphonates (tels Actonel®, Fosamax®), médicaments pour traiter l’ostéoporose, peuvent parfois provoquer des ulcères.
Notez qu’actuellement, il n’existe aucun moyen de prévenir l’infection à la bactérie Helicobacter pylori.
Mesures pour prévenir leur aggravation
- Prenez plusieurs petits repas à intervalles réguliers, mangez lentement et mastiquez bien chaque bouchée. Ne pas laisser l’estomac vide pour une longue période aide à réduire les symptômes.
- Évitez de boire en mangeant.
- Évitez de manger avant d’aller au lit.
- Il est important de ne pas fumer, car l’usage du tabac retarde et peut même empêcher la guérison des lésions de la muqueuse gastrique.
- S’il y a lieu, veillez à réduire votre niveau de stress en en comprenant bien l’origine et en faisant les changements opportuns à votre vie (le travail, une situation précise, une relation, etc.). Bien que le stress ne cause pas d’ulcère, on croit qu’il s’agirait d’un facteur aggravant important. Consultez notre dossier Le stress et l’anxiété.
- Soyez attentifs aux aliments et aux boissons qui aggravent vos symptômes. L’alcool, le café (même décaféiné), le thé, le lait et les produits laitiers, le chocolat, les boissons à base de cola, certaines épices (poivre noir, graines de moutarde, muscade), de même que les aliments riches en gras causent des douleurs chez plusieurs personnes. Évitez-les ou consommez-en une petite quantité avec d’autres aliments.
- La consommation de yogourt et de miel contribue à la guérison des ulcères gastroduodénaux.
- Avant de consommer un produit de santé naturel par voie orale, assurez-vous qu’il ne risque pas d’aggraver votre ulcère. La griffe du diable, par exemple, est contre-indiquée en cas d’ulcère gastrique ou duodénal.
Les traitements médicaux de l'ulcère de l'estomac et l'ulcère duodéna (ulcère gastroduodénal)
Il faut traiter énergiquement dès que le diagnostic est posé. Habituellement, le traitement médical de l’ulcère ne diffère pas, que celui-ci soit gastrique ou duodénal.
L’approche thérapeutique vise à :
- diminuer l’acidité de l’estomac, pour soulager les douleurs;
- traiter l’infection à la bactérie Helicobacter pylori, ce qui aide aussi à prévenir les récidives.
Avant de traiter, le médecin doit tout de même déterminer s’il s’agit d’un ulcère de l’estomac ou d’un ulcère duodénal. Si l’ulcère se trouve dans l’estomac, un prélèvement de tissus (près de l’ulcère) sera effectué pour exclure la faible possibilité qu’il s’agisse d’un cancer de l’estomac. L’ulcère duodénal, quant à lui, est pratiquement toujours bénin. L’examen consiste en un repas baryté (une ingestion de baryum, un liquide crayeux), suivi d’une radiographie de l’abdomen pour visualiser l’ulcère, ou en une gastroscopie. La gastroscopie consiste à insérer, par la bouche, un long tube flexible muni d’une minicaméra, afin d’observer les parois de l'estomac.
Médicaments
Les médicaments suivants, souvent utilisés en association, mènent à la guérison de plus de 90 % des ulcères en 4 à 8 semaines.
Pour diminuer l’acidité
Antihistaminiques H2. Ces médicaments réduisent la quantité d’acide que fabrique l’estomac. Cela permet de protéger la partie atteinte pour lui donner le temps de cicatriser. Le terme H2 désigne les récepteurs à histamine. Le médicament se lie aux récepteurs à histamine de façon à empêcher leur activation. La cimétidine (Tagamet®), la famotidine (Pepcid®), la nizatidine (Axid®) et la ranitidine (Zantac®) font partie de cette catégorie de médicaments. Il est possible de se les procurer en vente libre dans une pharmacie.
Inhibiteurs de la pompe à protons. Ces médicaments (l’oméprazole (Losec®), le lansoprazole (Prevacid®), le pantoprazole (Pantoloc®), le rabéprazole (Pariet®) et l’ésoméprazole (Nexium®) réduisent l’acidité de l’estomac encore plus efficacement que les antihistaminiques H2. Ils s’obtiennent sur ordonnance. Ils agissent en inactivant les « pompes » qui produisent l’acide chlorhydrique. Ils inhiberaient aussi la multiplication des bactéries H. pylori.
Antiacides. Les antiacides (Maalox®, Mylanta®, Gaviscon®, etc.) ne diminuent pas la sécrétion d’acide, mais neutralisent l’acide présent dans l’estomac, ce qui soulage la douleur. Ils prennent plus de temps pour agir que les bloqueurs H2 et les inhibiteurs de la pompe à protons.
Pour traiter l’infection
Des tests sanguins et d’haleine et, parfois, une biopsie de la paroi de l’estomac permettront au médecin de savoir s’il y a ou non une infection à la bactérie H. pylori.
Antibiotiques. Si l’ulcère est causé par une infection à H. pylori, le médecin prescrit en général 2 antibiotiques pour une période de 14 jours. Les antibiotiques les plus utilisés sont l’amoxicilline (Amoxil®), la clarithromycine (Biaxin®) et le métronidazole (Flagyl®). On combine souvent les 2 antibiotiques à un autre médicament contre l’acidité (voir ci-dessus) ou même à du bismuth (Pepto-Bismol®), cet antiacide pouvant aussi aider à combattre l’infection. Ce traitement permet d’éradiquer la bactérie et de guérir l’ulcère dans environ 80 % des cas. Si les symptômes reviennent, un second traitement est habituellement recommandé. Malheureusement, même lorsque l’ulcère gastroduodénal est bien guéri, il peut réapparaître quelques mois plus tard (c’est le cas environ 1 fois sur 5)
Important. Prendre la médication antibiotique au complet telle que prescrite, même si les symptômes ne sont plus présents.
En cas d’ulcères causés par les anti-inflammatoires
Le médecin recommandera probablement de cesser de prendre les médicaments anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS). Cela suffit généralement à faire disparaître l’ulcère, mais on prescrira habituellement aussi un antihistaminique H2 ou un inhibiteur de la pompe à protons pour quelques semaines.
D’autres médicaments moins nocifs pour l’estomac peuvent être utilisés en remplacement des AINS, selon le cas.
Habitudes de vie
En plus de prendre les médicaments, il est également très important de modifier certaines habitudes de vie, par exemple, l’usage de tabac ou la consommation d’alcool, qui endommagent la paroi du tube digestif.
Le traitement médical de l’ulcère peut nécessiter un régime alimentaire particulier prescrit par le médecin, préconisant, excluant ou limitant certains aliments.
Chirurgie
Seulement en cas d’échec du traitement médicamenteux ou en cas de complications, telles une perforation complète de la paroi digestive par l’ulcère ou une obstruction gastro-intestinale réfractaire aux médicaments.
Suivi
À la fin du traitement, on peut s’assurer de la cicatrisation de l’ulcère par une endoscopie (visualisation en direct du tube digestif faite au moyen d’un fibroscope).
Un traitement d’entretien d’une durée de 4 à 6 mois peut être prescrit pour prévenir l’apparition d’un nouvel ulcère.